samedi 8 septembre 2012

Kluane Park

Jeudi 6 septembre

Je me réveille sur les hauteurs de whitehorse, dans le bois, a cote de la piste de l'aéroport. Gwendal et Julien (dédicace frero fallait le faire quand meme Gwen!) - deux bretons qui voyagent depuis dix mois, partis d'Ushuaia leur trip ici - lèvent aussi le campement. Je les avais invités la veille a squatter ce coin que j'avais repéré en quittant l'auberge. On descend de notre perchoir et après être passés au centre de la francophonie consulter internet, on se dit au revoir. Pour eux direction l'Alaska emprunter la piste stampede, ou chris McCandless a fini ses jours dans un bus perdu au milieu la tundra, un certain livre et film: into the wild! Et pour moi l'exploration des environs de Whitehorse. Apres moults hésitations je me suis décidé a attendre des accessoires que mon colloc m'a réexpédié depuis Montreal. ils n'arriveront que lundi en ville.

Je pars sur les coups de 13h en direction de l'autoroute. la meme que j'avais pris pour aller a Dawson, mais cette fois ci direction Haines junction faire quelques sentiers dans le parc Kluane, le royaume des grizzlis! J'hésitais a aller dans ce parc après ce que j'en avais entendu: sentier fermes pour cause de trois familles de grizzlis, un ami qui avait trouve des traces toutes fraiches sur son trail. L'hiver approche et les ours n'hésitent pas a descendre manger les baies aux pieds des montagnes, faire les dernières reserves avant l'hibernation. Du coup j'entends dire que les ours sont partout en ce moment. Le fait d'être en solo n'aide pas forcement non plus a se rassurer dans les sentiers. Je suis aussi sur le pouce et ca peut me rendre l'approche d'un sentier difficile, idem pour en ressortir (heure tardive... dormir etc) ... Mais sur un guide du coin j'ai repéré un petit sentier d'à peine deux heures, a l'intérieur même de la petite bourgade de Haines Junction. Ça me parait jouable et le temps n'est pas trop mauvais. Avec un peu de chance je pourrais faire l'aller retour dans la journée (j'ai quand meme tout mon bardas au cas ou hein) en route!

le temps est clément mais le vent souffle en tabarnak, des nuages gris pointent le bout de leur nez a l'horizon, je remonte sur le plateau au dessus de la ville pour rattraper l'Alaska highway. c'est un gars de l'ontario qui me prend après plus d'une 1h30 d'attente. Il vient chasser l'orignal près de Faro, avec chevaux et hydravion, son pèlerinage annuel qu'il me dit, il tire une grosse remorque remplie de matos.


il enlève ses grosses lunettes de soleil pour la photo et me dépose au croisement avec la klondike highway qui mene a dawson, seulement un petit 15km apres avoir brandi mon pouce mais c'est toujours ca de pris. La luminosité baisse, un voile s'installe devant le soleil et le vent ne faiblit pas. Peu de voitures passent dans ma direction, j'oublie l'aller retour dans la journée et je repère même les lieux des fois que j'ai a passe la nuit ici... et puis la vitre d'un van descend, c'est Celine, l'une des quatre française qui m'avait ramené en ville qui revient d'un trip sur la yukon river avec Severine! Elles me saluent, on échange deux mots et le van de la compagnie de location de canoe repart. le territoire est grand mais le monde est petit!

Par chance un gros pickup s'aligne dans le gravier, c'est un mec du coin, sam white - un quart russe, un quart première nation du cote de ma destination, du clan Kluane et moitie canadien - qui m'emmène jusqu'a Haines Junction, a 175km a l'ouest. Il tient un business d'eco-tourisme, chasse, pêche et photographie animalière (cest assez rare de croiser quelqu'un qui ne chasse ou ne pêche pas dans le coin). guide de chasse depuis l'age de 16 ans, il me parle de ses prochaines vacances, les premières qu'il va prendre, il va pouvoir prendre le large et profiter de temps a lui. il se demande ou aller, un endroit ou il fait chaud surement. Il me raconte ses rencontres avec les ours comme ce vieux grizzli de 38 ans quil a abattu en 2000, plus gros ours de l'année. Au même instant, ses chasseurs ont abattu le plus gros mâle orignal. L'ours etait en train d'attaquer l'orignal en plein lac! le grizzli était tellement vieux que ses canines ressemblaient a des moignons, et ses molaires éclatées, fendues comme du bois qui a séché trop vite. Avant chaque abattage, il sait reconnaitre l'age de l'animal a son apparence, il choisit toujours le plus vieux. Il doit aussi garder le crane et l'os pénien pour dater l'age de l'animal et vérifier que la bête était bien un mâle.

Il y a quelques années Sam a survécu a l'attaque d'un ours noir en se jetant dans un lac. L'ours le pistait et l'a poursuivit dans les eaux, il a du viser l'œil au couteau et l'asperger d'eau sur le nez pour le noyer. L'ours est revenu a la charge une nouvelle fois a tente de faire le tour pour l'attraper sur l'autre rive. au final Sam a réussi a détaler jusqu'au campement ou des amis chasseurs restaient, a 300m mais hors de portée de voie. Pouvant juste bafouiller "Bear! Bear!" sous l'effet de l'adrénaline, personne n'a réagit, il a empoigné son fusil et est reparti chercher l'ours qui était déjà bien loin. C'est seulement l'année suivante qu'ils l'ont abattu, une femelle, qui avant sam, n'avait surement jamais du rencontre d'homme auparavant. Bien d'autres histoires suivent, la nature est sauvage. Le temps se dégage dans la vallée, et le trajet prend fin. Sam, le "bon" chasseur, me dépose au centre d'information du parc, a l'entrée de la ville, thanx man!

Après avoir récupérer la carte des lieux j'entame un petit sentier au pied du premier rang de montagnes du parc. elles montent a 2500m. les rangées derrières montent successivement a 3000, 4000 et plus de 5000m ou culmine le mont Logan le plus haut du canada. Les nuages se cantonnent aux sommets - ou des paquets de neige éternelle sont disséminés - et la température est aux 15degres, parfait pour randonner, j'attaque le sentier alors que la lumière décline déjà, je camperai ici.




 Le soleil se couche et l'humidité s'installe. Je me dirige vers le RV park (RV pour recreation vehicle, du genre camping cars) et me trouve un site pour monter la tente, et faire la popotte au coin du feu


je m'endors facilement et je me recouvre de la couverture de survie pour perdre le moins de chaleur. Le réveil est difficile, un peu tendu du froid environnant, le ciel est complètement bâché. Je me refais un feu histoire de me réchauffer, sécher l'intérieur de la toile de tente a distance respectable et faire la cuisine, céréales, café, tartines beurre de cacahuètes, beurre confiture, banane. La totale! Mais les nuits fraiches font consommer des calories et la journée risque d'être longue: j'ai envie de retourner sur le sentier de la veille voir les montagnes et peut être faire un autre sentier. J'approche du point d'observation de la vallée et je comprend mieux pourquoi j'ai eu si froid, il a neige pendant la nuit sur les montagnes, une mince couche mais quand même!



Je quitte le dezadeash trail dans la grisaille et me decides enfin a faire l'Auriol trail a 7km au sud ouest de la ville. Une boucle de 16km.il est deja midi passés mais j'aurai peut être plus la chance de revenir ici avant un bout. Je demande du carton a des gars de chantier et inscrit le nom du sentier et la distance. On m'a conseille la pancarte pour avoir plus de chance avec les locaux et pour savoir que je ne comptes pas traverser la douane américaine a 200km au sud (la pointe de l'Alaska).
...  Pratiquement aucune voiture, la vallée n'est pas tres peuplée et vu le temps on comprend que ca donne pas vraiment envie de sortir (hum hum). c'est pas gagné, mais Andy s'arrete, il demenage des affaire de Anchorage et s'en va prendre le ferry pour emmener le tout dans un patelin pres de Juneau, courte ride je sors mon backpack de l'arriere bien charge du pick up et Andy redecolle, bonne route aussi!


Je retrouves seul sur le parking, je vais planquer mon sac dans les fourres. Autant que je peux j'évite de randonner avec 25kilos sur le dos! j'attaques le trail, et sur les bons conseils de Sam je me trouves un bâton pour me defendre si jamais un ours chargeait. Le bâton en question est un peu ridicule et j'avances tout en lorgnant les alentours. Mon troisieme est le bon, du bon boulot (ahaha). Je tailles l'extrémité comme je peux (couteau suisse perdu aussi, j'ai un couteau a steack maintenant). L'ours s'en servira surement comme cure-dent mais je suis rassure, c'est le principal.

Je me balade en tirant ma lance, les petits cris des ecureuils m'accompagnent de temps a autre, ils trimballent des champignons presque aussi gros qu'eux dans les arbres, ce qui explique mieux les champignons qui jonchent les branches, ils doivent en perdre la moitie en route. Ces considerations philosophiques font parti de l'observation j'essaie de denicher un bout de vivant dans la foret environnante, etre la. A part de vieilles traces de pattes d'orignal aussi grosses que mon avant pied, pas un etre ne se montre. bon je chante de temps a autre pour avertir les grizzlis, ca doit plutot faire fuir la vie animale. Et puis ce trail est relativement facile il doit etre assez emprunte, les betes doivent l'eviter.


les couleurs de l'automne, déjà bien avancées ici, sont magnifiques, le mauvais temps empêche de leur rendre justice. La luminosité que dégagent les feuilles jaunes et oranges est quasi phosphorescente.
les sommets de la chaine des monts Kluane sont dans la brume neigeuse, sur le sentier seules quelques gouttes tombent mais l'air est tres humide.


le cure dent géant
apres un peu plus de 4h et un casse croute dans les hauteurs, je reviens sain et sauf, les pieds trempées par les herbes humides mais aussi pressé car il se fait tard, et le trafic est quasi absent. Je reprend le sac et commence a marcher vers la ville, 7bornes c'est faisable, apres quelques kilomètres et 4voitures plus tard, Karen freine en descente, un petit lift qui me réconforte,  mes mains sont congelées, (encore paume mes mouffles a 1$ sur le trail). Elle me débarque au meme endroit ou sam m'a depose la veille.
Il pleut plus fort maintenant, une pluie glaciale. je tends le pouce aux quelques autos qui passent. Un van fait demi tour devant moi!!! Kate et Nash de las vegas me liftent jusqu'à Whitehorse, yihaaa!

Arrives sous la pluie froide ils me déposent avec gentillesse devant un supermarche pour que je puisse faire le plein. merci a vous deux pour ce demi tour inespere!

Je reprend la route et traverse la ville jusqu'aux auberges de jeunesse. Pleines, a craquer, il reste une petite place en arrière sous un sapin ou je pourrai monter la tente, qu'a cela ne tienne, je l'installe rapidement et prépare un repas copieux, je meurs de faim. J'en profites pour prendre une bonne douche bien meritee, me raser, laver une paire de chaussette, et quand meme discuter avec le monde! 

On parle ours avec un certain Paul, un britannique dans la trentaine, il a fait kluane il y a dix jours mais pour des randos solo de 4jours! il a croises deux jeunes grizzlis qui s'entraidaient pour escalader une petite falaise et fuir ce bipede qui devait leur paraitre bien etrange. Je retrouve Kuya, un japonais etabli depuis 10ans en Colombie-Britannique. Il partait pour 12jours sur la riviere Yukon a mon premier passage a Whitehorse. Lui aussi a vu des grizzlis depuis son canoe, un poste d'observation autrement plus rassurant. On parle aussi de l'attaque mortelle au Denali park la semaine passee, un allemand s'est fait découper en morceau par un puis trois grizzlis, il avait voulu prendre des photos d'un peu trop près, pendant 8minutes indiquait son appareil photo... 

Je partage un peu de fromage de brebis avec une londonienne de vancouver venue rendre visite a sa soeur. Voyageuse régulière en France, je lui parle du pays et lui montre des coins sympa a aller voir sur la carte en ligne.

Extinction des feux tardives dans l'humidite ambiante, je squatte une couverture supplementaire et un coussin, c'est un luxe sommaire que j'accueille avec plaisir, je lis quelques pages du recit du tour du cercle polaire par mike horn pour me rechauffer. je reajuste mon sac momie pour ne laisser que le nez... bonne nuit!

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