vendredi 16 novembre 2012

retour a la source

Vendredi 19 octobre

J'émerge du concert de la veille et vais à la cuisine de l'auberge me prendre un café pendant que je lance des pancakes. Je pars acheter quelques bricoles comme une nappe imperméable, des piles pour l'enregistreur, ... J'ai bien sur choisi la meilleure journée pour partir et c'est finalement sous une pluie battante que je lève les voiles.
douche froide pour le depart dans les bois

Un bout à pied pour sortir de la ville et une dame extrêmement gentille m'emmène un peu plus loin que sa destination. June habite harrop une ville sur la même rive que Nelson mais si éloignée que le seul moyen de s'y rendre par véhicule est de prendre une barge depuis l'autre bord. Elle va chercher son mari à la sortie du travail, il s'occupe de l'entretien des machines qui trimballent les arbres de la pépinière de harrop. Ce sont les même arbustes qui seront envoyés aux équipes de planteur d'arbre. Les tree planters, les saisonniers qui passent derrière les coupes à blanc forestières pour tenter de recréer une forêt après quelques années

June

l'embarquement pour le ferry qui traverse le lac kootenay dans la largeur, je reste sur la meme rive et continue vers le nord
June me laisse devant le ferry qui traverse le lac à balfour. De la, Ann une résidente de kaslo me fait monter à l'arrière de son van équipé handicapé. Judith me propose de me reprendre une heure plus tard pour m'emmener jusqu'à cooper creek mais j'espère bien trouver une ride avant. Merci Ann
Ann
Apres dix minutes, c'est une famille qui me fait une place au milieu du van, derrière kirkland joue à la gameboy. La famille vient de l'Alberta ou vivent les autres enfants, plus grand. Ils poussent les parents et le petit dernier à les rejoindre. Ils hésitent a partir car même s'ils adorent la nature, l'école risque de fermer à meadow creek, les emplois diminuent avec la coupe forestière qui a tourné en sur régime jusqu'à maintenant. Normal qu'il n'y ait plus de boulot, y'a plus d'arbres! D'autres discussions sur l'économie locale qui n'est pas florissante. Je remercie la petite famille qui me laisse sur duncan road, la piste qui m'emmène à l'embouchure  de glacier creek.
chevy, kirkland et gary
Ca y'est j'y suis, le cap de mon trip, allez voir les grizzlis, une phrase qui résonne depuis des mois dans ma tête, mais une phrase qui commence a s'effacer, personne n'est la pour me prendre par la main. C'est pas avec un tour operator que je pars. Je pars dans le bois pour me retrouver, etre un peu seul, experimenter loin de ma vie de citadin, voir à quoi ca ressemble et revoir Mike et storm ces deux vieux brigands de la montagne.
Finit l'asphalte, finit les gens, finit les voitures, je pars pour un 12km de marche vers le lac du même nom que la route. Le soleil décline derrière les nuages, un bon 16h30 passé, c'est déjà tard dans les rocheuses. Je penses à la nuit qui s'en vient et me souviens de platformes de planches brutes dans les arbres au bord du lac. Des construction sommaires mais hors sol, et ca me sauverait ma nuit. Après quelques kilomètres sous le crachin j'aperçois un vieux pickup cahotant venant vers moi. Je dis ou je me rend et le gaillard à la barbe grisaillante me dit que ça fait une trotte et me conseille un spot plat pas très loin qui fera l'affaire pour dormir. Impossible de trouver ce dont il me parlait, tous les champs sont trempés. Je me trouve encore en aval du barrage de la rivière duncan. Y'a bien ces sapins très denses ou je pourrais bivouaquer mais ça me tente pas non plus de remballer et replanter le lendemain plus loin. En route pour le village dans les arbres.
direction les bois!


la piste que je suis pendant 12km avant darriver au campement
J'entre dans la nuit et le silence de la montagne, quelques cris d'écureuils surpris à mon approche, un ruisseau par la, les gouttes d'eau qui ricochent sur mon imper. J'ai la flemme de changer les piles de ma frontale, je garde le peu de batterie pour le bois et marche à la lueur des nuages. Tout se schématise , comme si une croix découpait ma vision en aplats de couleurs, un  triangle gris en haut, un triangle gris foncé au sol et deux triangles noirs de part et d'autre du chemin. Les proportions changent quand je monte, descend, tourne. Flotch! À faire le malin j'ai mis le pied dans une flaque d'eau, merci de l'avertissement j'enclenche la lampe pour faire miroiter les flaques et pas me taper une entorse comme un bleubite. Après deux heures et demi à marcher seul dans le noir j'entends un grondement: ça y'est glacier creek tonne devant moi! Je passe le solide pont en bois et reconnais le chemin qui part sur la gauche vers le lac. Une pancarte marque glacier creek north recreation site. Je pénètre dans le labyrinthe, les sentiers ne sont pas entretenus et les feuilles mortes recouvrent le chemin. J'avance à taton entre les racines et les roches, je fais ressortir mes souvenirs pour m'orienter. Essouflé je pose mon sac rempli à gueule de bouffe, j'ai la bonne idée de me dire que j'irai plus vite à trouver le site. Et au bout de quelques minutes ça y'est j'aperçois des troncs attachés en hauteur entre les arbres. Certaines plateformes ne sont pas finies. Rien n'a l'air d'avoir bouger depuis les trois dernières années. Avec ma bonne idée un autre jeu prend la relève, retrouver mon sac, la boulette. Et les nouvelles batteries sont dedans. Bah après un moment je le retrouve bien sur ça fait partie du fun! Après une nouvelle recherche du site (décidément il est vraiment bien planqué, j'aurai pu faire comme le petit poucet!) je choisis l'abris le mieux protégé par les arbres, au cas ou il se remette a pleuvoir fort. je nettoie les planches de la flotte et comble les interstices de la plateforme avec d'autres planches qui traînent parterre. La tente passe parfaitement entre les troncs. Je sais pas si y'a des bêtes qui descendent dans le coin mais d'être en hauteur me rassure pas mal. Je laisse quand même ma bouffe dehors des fois que. 21h30 extinction des bougies dans l'humidité et le vent qui souffle en rafale depuis le lac, mais dans le sac de couchage on est pas si mal, je me dis que c'est complètement fou d'avoir retrouvé cet endroit de nuit 3ans après, whouhou je suis dans le bois!
le barrage du lac duncan

je trouve enfin les plateformes dans les bois

Je me réveille plusieurs fois au cours de la nuit, le froid et la pluie me tirent du sommeil, je balance la couverture de survie et resserre les cordons de mon sarcophage. Au matin je revis, la lueur perce enfin, j'ouvre les fermetures et pointe le nez dehors. De la glace recouvre en flaque le bas de ma tente et sur les planches aussi, c'était pas seulement de la pluie mais de la grosse neige fondue qui a gelé! Je me retourne et contemple le spectacle magique, j'ai vu sur le lac et les nuages se sont retirés sur les sommets d'en face, j'embarque l'appareil et cours sur la plage. C'est mon cadeau du matin, je suis seul ici, projection privée grandeur nature, le calme du lac, le ronron du torrent caché par le bois, quelques corneilles passent...  Bien heureux d'avoir persévéré et poussé la marche jusqu'à ce campement, le lieu est incroyable.
reveil au milieu de nulle part
ma premiere projection privee, le spectacle des nuages dans la vallee et les pics

la foret automnale des rocheuses
En regardant vers la gauche de l'autre côté de l'embouchure j'aperçois un abris au toit en tôle ondulée. Ouvert à tout vent mais peut être que le lieu est mieux pour camper dans ces conditions. J'irai voir ça tout a l'heure en attendant faut que je lance un feu. J'ai pas mal de prospectus à flamber mais tout le bois est trempé, ca me prends beaucoup de temps je finis par avoir quelques flammes et beaucoup de fumée, tout un échafaudage de bois à sécher autour du feu. Sur les braises je me fais une grosse potée pour le midi. Je referme le couvercle et pars à la découverte du fameux appentis, la marmite sous le bras. Je m'aperçois qu'un chemin qui partait sur la gauche avant le pont est en fait la partie sud du site de plein air. Je déboule dans un véritable camping, la blague! Pancartes d'emplacement, toilettes sèches, balançoires, bref la civilisation! Mais rien d'extraordinaire la plage est recouverte de bois mort. Le lac est à son niveau le plus bas, ça m'a frappé sur la plage que je n'avais pas vu la fois précédente, c'était mi aout. Comme au dessus de naramata l'été a été sec et c'est la fin de l'année, les souches dépassent de l'eau, la plage est grise, ocre, de la terre ou s'amoncèlent les troncs, des allures lunaires. Mais malgré le vent qui souffle les bouleaux arborent encore fièrement leur feuillage doré et égaient ce campement désert. Je dévore mon repas chaud au soleil sur une des table de camping.
ma plage vu depuis la partie sud du site de recreation


les dernieres coupes a blanc



les barrieres de log booms au chomage

un resineux qui perd ses epines




L'heure tourne et le soleil va se coucher d'ici quelques heures. Je retourne à mon campement poser le matos ranger la bouffe pour les bêtes. Même de jour j'ai de la difficulté à retrouver le lieu! Un peu plus tard je grimpe le long de glacier creek, je vais rendre visite à Mick et storm. Des arbres sont tombés en travers, le torrent en contrebas s'efface et ressurgit plus loin, tourbillonant dans la roche, j'approche. Je vois des vaches et un petit taureau shetland tout poilu, une grande chienne genre labrador suivie d'une autre chihuahua déboulent et me japper dessus. Je fais connaissance avec elles et poursuit la route vers la maison de storm. Je l'apercois derrière les carreaux d'une roulotte et lui fais signe. De la fumee s'échappe du conduit, la porte s'ouvre et je retrouve ce petit brin de femme, elle se souvient de moi et m'invite à rentrer au chaud. Elle m'explique qu'elle fait un peu de nettoyage pour peindre et copier les motifs du tipi à son fils. La route de glacier creek est réouverte depuis 1mois seulement. Un gros glissement de terrain en bloquait l'accès pendant l'été. Personne d'autre qu'eux n'habitent sur cette piste et les travaux ont tardé. Du coup ils n'ont pas pu monter le foin a temps pour les chevaux. Ils vont devoir descendre une partie de l'hiver dans la vallée avec le troupeau et camper sous le tipis. Ils l'ont fait y'a 20ans ils devraient pouvoir le refaire cette fois qu'elle me dit!
Mike est parti a la recherche de 7 chevaux plus loin sur duncan road, les autres sont plus haut dans les pâturages d'altitude. Mes souvenirs sont vagues mais il me semblait que Mick pechait le saumon a cote des grizzlis, et, par curiosite je lui demande ce qu'il en est de leur population dans le coin.
Storm ne pars jamais pecher mais Mick ne peche pas le saumon mais d'autres poissons, au nord du lac, a l'embouchure de la riviere duncan. Pour les grizzlis ils n'en voient plus depuis des annees, Storm craint pour ses chevaux car depuis une dizaine d'annees les loups ont pris d'assaut la vallee et se sont multiplies. chaque annee elle pert un a deux chevaux, les loups ont deja pris beaucoup de gibier et ont faim. Elle espere cette annee que ces 7 betes sont indemnes mais compte bien arreter l'elevage, ca lui cause trop de souci. Elle en a croise quelque fois et un male faisait deux fois la taille de sa chienne, des pates grosses comme ses mains. Elles pensent qu'ils empruntent les traces de motoneige pendant l'hiver pour changer de vallee et de terrain de chasse. Mick a aussi retrouve des poils de grizzly dans leur dejection. Une horde a du eloigner un petit de sa mere.
chasser les mauvais esprits
On parle de tant de sujets, l'heure tourne et le soleil se couche, je dis au revoir a mon hote qui me donne une part de gateau pour la route et une courge pour la soupe. Comme prevu j'arrive encore de nuit et me fait la tambouille dans le noir, je decouvre des traces de petites dents dans mon fromage... les ecureuils evidemment. ca m'apprendra a pas planquer ma bouffe mieux que ca. quelques souches sont sechent et m'envoient un peu de chaleur.
Le silence, mais au loin le torrent s'eclate et tourbillonne dans les pierres. ca produit des sonorites changeantes et avec les histoires de storm sur les loups je commence a detourner le bruit comme le festin d'une horde affamee. la paranoia des bois. un environnement familier qu'on a pourtant presque tous oublie, le jour c'est la joie, la beaute des lieux, la nuit c'est l'inconnu la peur de voir ses demons surgir du noir... Sur mon perchoir je trouve rapidement le sommeil bien que le froid arrive. Ce dernier perce mon demi-sommeil je craque un gel de chaleur, un echantillon que j'avais glane a igloo fest a montreal, je lui trouve enfin son utilite. je me rechauffe les extremites et finis ma nuit.

equipe contre le froid, j'aimerais pas non plus me rencontrer la nuit dans les bois
la lueur du jour se montre timidement, un bruit de tronconneuse au loin,  j'ouvre la fermeture, sort et me retourne, de la neige couvre tous les troncs de la plage. tout fou comme un gamin, je vais admirer l'oeuvre de la nature. La neige est presque descendue jusqu'au niveau du lac, la brume neigeuse s'eleve doucement. Au coin d'une souche je decouvre l'origine du bruit matinal, un peux plus loin deux types sont installes a l'embouchure et pechent ils ont du se couper quelques souches. Je fais des signes a un des gars et vais les saluer. Pas tres bavards, ils viennent de nelson pour lever quelques poissons, ca grouille pas des masses ici mais je leur souhaite bonne chance.




Je passe ma journee a faire de l'exercice sur la plage et plus loin sur la route. le temps est maussade mais il s'en tient a de petites pluies. Je m'apercois aussi que ces saloperies de rongeurs ont dechire le filet de ma tente et continue a entamer mes provisions. des petites crottes jonchent la toile de sol, tout ca pendant la nuit bien sur, les temps sont dur et l'hiver approche. Je tire aussi une porte de roulotte qui trainait sur la plage. Elle pese un ane mort mais ell est recouverte d'aluminium, ca me fera un parfait ecran refractaire pour le feu.
Le lendemain c'est le sommum de la neige partout, et le soleil illumine les cretes, j'en reviens pas! le temps se rechauffe un peu et la neige de la canopee goutte sur mon abris pendant la matinee, je galere a me mettre au sec pendant que je cuisine, un comble alors qu'il fait soleil!

depuis mon perchoir










Le soleil commence deja a passer son point culminant, je vais dire au revoir a storm, j'ai decide de lever les voiles le lendemain, pas d'escapades prevues pour voir des nounours, sans vehicule et dans des conditions limites pour mon equipement, c'est l'heure de continuer la route!
Alors que la neige a fondu au niveau de l'eau, je penetre dans un bon cinq centimetres de neige fraiche qui craque sous mes pas. je la croise en montant, elle revient avec son break et trois bottes de foin.On prend un the au chaud et elle rit de mes mesaventures avec les souris, elle me dit que les rongeurs sont les pires ennemis ici, bien avant les loups qui ne s'approchent pas trop des humains. De fil en aiguille j'apprend qu'elle a vecu en nouvelle zelande pendant 12ans! Une de ses bonnes amies kiwi lui a rendu visite il y a quelques annees, elle me donne ses soordonnees, elle et son mari tiennent un ranch dans le northland. Incroyable, j'irai peut etre faire un tour par chez eux!
Avant de quitter les lieux je pars plus haut sur glacier creek remonter vers mcbeth icefield, le sentier que j'avais emprunte avec denis la derniere fois. je m'arrete au dernier pont prend la photo et redescend. Une derniere embrassade a Storm au passage et je reviens encore de nuit, decidement!









Pour ma derniere nuit je me fait une grosse flambee avec du bois que j'avais mis a secher, et surtout un bon aligot pas si pire avec mes patates, le fromage epargne par les rougeur et de l'ail que david m'avait file a powell river! les chaussures qui sechent au coin du feu, chaleur et bon repas, le bonheur ne tient pas a grand chose.
au coin du feu
Un reveil sans pluie ni neige, je pacte et seche tout l'equipement autour du feu, nettoyage des lieux. Je pars pas de bonheur mais j'ai beoin de prendre le temps. Apres mes douze bornes jusqu'a l'asphalte, je me retrouve a Nelson en deux lifts au coucher du soleil!

au revoir galcier creek

loin derriere, le lac duncan

don et caroline de cooper creek

kaslo, flamboyante

john le taciturne

C'etait un court passage dans la montagne, mais vivre les premieres neiges de l'hiver - un melange complexe entre harmonie et combat, le contraste du jour et de la nuit - ce sont des impressions et une experience que je garde en moi.

Parti a la recherche du grizzly, etre inconnu et cache, j'ai simplement retrouve la Nature et c'etait grand.

1 commentaire:

  1. super article sur cette merveilleuse aventure mon Nils, je t'admire. bibis

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