Dimanche
10 mars
Départ d'Auckland, je passe a nouveau la porte de chez Anna, cette fois-ci direction le mont Taranaki au sud ouest de l'ile, un volcan actif qui s’élève de la mer Tasman pour atteindre 2500 mètres d'altitude. Sur les cartes du pays que je scrute depuis des mois, la montagne m'a toujours fascinée, un cône presque parfait qui se démarque de son environnement complétement plat, une figure unique qui domine presque l'ile du nord, un géant qui pour les prochains jours ne se cachera pas au dessus des nuages. Le Taranaki, un crochet sur ma route vers les vendanges, peut être ma dernière chance d'aller le voir.
En attendant de découvrir le vertige des cimes, la réalité me cloue au plancher, mon sac pèse des tonnes, je garde encore l'ordi que
j'avais dégoté à Wellington, dépoussiéré d'une colloc ou on le laissait
croupir. Résultat même après m'être débarrassé de mes affaires d'hiver
mon sac s'est transformé en monstre. Pour le moment j'en garde encore le contrôle, mais a quoi bon, je me dis toujours qu'à chaque fois que mon sac prend du poids, je régresse dans le
voyage.
M'enfin
bref je sors sous le soleil de midi et me trimballe jusqu'à mon spot de
pouceux. Le maillot colle aux sangles de portage,
c'est l'étuve sous mon chapeau en papier de soie. Je souffle un bon coup
quand je pose le bardas sur simons et k-road, à l'entrée de l'autoroute
sud. Un petit coin d'ombre et une petite brise aère mon t-shirt. Je réalise alors que j'ai pas mon cellulaire, ni surement mon cordon pour recharger l'ipod et les adaptateurs de batteries, bref les petits classiques de la route, encore un coup du sac escargot bien trop rempli. Aucune idée d’où ils pourraient se trouver, après balance du pour et contre, le voyage m’appelle, milieu de journée, pas d'envie de faire demi tour fouiller le fouillis, je ferais sans!
Après une très grosse heure d'attente, pouce tourné vers le haut, je décroche une voiture de la file de l'embranchement, ouais!
Zahir, d'origine Palestinienne travaille comme médecin dans un hôpital
dans la banlieue. Sa famille a émigré un peu partout dans le monde,
seule sa tante demeure encore au pays. 12 ans qu'il est en nouvelle
Zélande, il a aussi travaille en écosse. On parle tolérance et religion,
un homme ouvert qui à l'air d'accueillir chaque jour avec un grand
sourire. En partant attentionné il se soucie de savoir si je veux qu'il
me prenne une bouteille d'eau au dépanneur, je décline car j'ai ce qu'il
me faut et il me donne quelques bonbons pour la route (oui je sais il
ne faut pas accepter les bonbons des messieurs). Je quitte mon chauffeur
qui me donne tout de même un petit pamphlet sur Mahomet et l'Islam.
Sacré Zahir! Salut et surtout merci pour cet échange.
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Zahir |
Je
remonte l'échangeur pour me mettre en vue à la fin de la bretelle
d'autoroute, deux minutes passent et un groupe de quatre jeunes
demoiselles me font de la place à l'arrière de leur caisse. Toutes
excitées de prendre un autostoppeur, elles me posent les questions
classiques auxquelles je me fait un plaisir de répondre avec humour.
Elles vont à la plage à vingt minutes de la, les fenêtres sont toutes
ouvertes, radio à bloc, lunettes de soleil, cheveux dans le vent et ma
voisine qui me tend une can de bourbon cola, elle est pas belle la vie!Elles
me déposent sur un échangeur ou la chaleur ferait cuire un œuf sur le
bitume, je les saluent pendant qu'elles repassent devant moi en
gloussant. Salut les pitounes, bonne bronzette!
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les ptites dames |
Et
je cuis comme un œuf sur cette bretelle en plein chantier...
Heureusement c'est dimanche et personne ne bosse j'en profite pour
déplacer les plots de sécurité le long de la voie d'accès pour que les
voiture puissent se garer. Cette lointaine banlieue ne déborde pas
d'activité le dimanche après midi. Je déguste ma gourde a petites
gorgées en regardant les fumées d'un incendie qui se détachent sur le
ciel immaculé. Une petite voiture finit par s'arrêter à mon côté en
faisant voler un fin nuage de poussière orange. Fiona s'est dit que ça
serait sympa d'avoir un peu de compagnie, à condition que je ne la tue
pas! Promis m'dame!
Elle
vient de déposer ses deux enfants chez ses parents, on se racontent nos
origines. Sa mère est maori et son père est "pakeha", le blanc en maori, un
super mélange en tout cas!
Elle me laisse a une sortie et je me retrouve a la campagne, enfin! dur de s'extirper des tentacules d'Auckland. Au revoir Fiona
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Fiona |
De
retour sur l'autoroute, seul bout de ligne droite, Phil, fils de
fermier de la région, me fait monter dans son break, sa mère et sa
petite dernière à l'arrière. On parle job, il bricole chez des amis pour
le moment vers Hamilton, pendant quelques années il retapait des boîtes
de nuit sur Auckland mais c'était pas très payant, depuis il enchaîne
toutes sortes de job. Il s'arrête à une station essence savoir quel est
le meilleur chemin pour aller vers le Taranaki. Le pompiste me confirme
de prendre la 39 ici à Ngaruawahia. Je laisse Phil poursuivre sa route
de l'autre côté d'Hamilton. À plus l'ami!
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Phil |
Très
rapidement une petite Toyota se met à ma hauteur. Son chauffeur fait de
la place à l'avant. J'ouvre la portière et annonce ma destination, il
va à new Plymouth juste à coté du volcan, génial!
Je
fais la rencontre de jim, architecte pour les bâtiments de l'éducation
qui s'en retourne chez lui, il avait rendez vous avec une école à
Auckland. Beaucoup de paperasse qu'il me dit et pas tant de design. Oui
mais c'est pour la bonne cause au moins que je lui réplique. New
Plymouth est encore à une bonne trotte et Jim m'invite au subway, je
prend la même chose que lui, un sandwich végétarien. On parle de voyage
et me raconte son tour d'Europe à vélo qu'il avait fait quand il avait
mon âge. Je remplis ma gourde et on reprend la route, le soleil décline
tranquillement sur notre droite, la route se met à faire des lacets dans
les gorges. Une flore tropicale nous submerge, accrochée à des pentes
vertigineuses, et puis passé un virage, une plaine, un ancien marais
asséché sur lequel le bitume fait des vagues mais en ligne droite. "The
lady's mile" que ce tronçon s'appelle me dit Jim, dans le temps c'était
le seul bout de route pendant lequel les hommes pouvait conduire tout en
tenant la main de leur dulcinée! À nouveau la route se glisse entre les
collines, certaines coiffées de pains de terre laissant apparaître des
parois abruptes sur leurs flancs. À un sommet, Jim gare la voiture le
temps d'admirer les derniers rayons qui lèchent les crêtes de la vallée.
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Jim |
On
replonge dans les sillons des monts dégarnis en serpentant entre les fougères géantes.
Progressivement elles s'effacent au profit de pâturages, la route est
toujours en dos de chameau, le soleil se couche maintenant presque
devant nous. Et soudain je l'aperçois, dans les lueurs orangées du
couchant, devant moi, la pointe du mont Taranaki se dresse à l'horizon.
J'en reviens pas, dans cet environnement qui ressemble maintenant à la
Loire atlantique, un colosse de terre a poussé il y a quelques centaines
de milliers d'années. Une figure de survivant au milieu de ce paysage
déboisé, retourné, façonné par l'homme en moins de cent ans.
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vulcain |
Finalement
on arrive de nuit à New Plymouth et Jim m'offre le gîte pour la nuit.
Un grand merci pour ça. Je rentre dans sa petite maison a l’intérieur plein de charme,
plancher grinçant, vieux éviers et baignoire en céramique. Dans l’entrée son vélo avec lequel il avait tourné en Europe, nouvelle fourche mais toujours opérationnel! Jim
débarrasse un lit de tous ses documents d'archi, et d'un carton photo
éventré d'où s'échappent quelques photos d'un voyage en Inde il y a
quelque temps, tirages argentique. Je jettes mon sac de couchage dessus, c'est parfait. Jim tire une vieille carte détaillée du mont Taranaki avec les voies d’accès, après en avoir discuté dans la voiture il me montre comment monter au sommet, je vois une hutte ou je pourrai laisser mon bardas pendant l’ascension. Moi qui n’espérait même pas pouvoir grimper jusqu'en haut, j'ai les yeux qui brillent rien que d'y penser. Comme pour la traversée du Tongariro j'ai le projet de partir du parking nord et de randonner jusqu'au centre d'accueil sud et reprendre la route a cet endroit pour Wellington. Je verrai demain comment ça se goupille.
La nuit est magnifique et jim m'invite
a aller sur la plage qui est à deux pas pendant qu'il vaque à ses
occupations. Quelques minutes plus tard je marche le long de la mer dans
le grondement des rouleaux qui s'éclatent sur les écueils. La voie
lactée est au zénith, des bateaux démarquent l'horizon au
lointain. Whaou quelle journée!!! Merci à toutes et à tous.
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